La Théorie de la Traduction
LATOUR Bruno
CALLON Michel
Théorie
Ces
deux chercheurs se sont intéressés, entre autres sujets, à l’innovation.
Lorsque
dans un secteur d’activités s’avère nécessaire une innovation, le chercheur (du
département Recherche & Développement par exemple) la propose,
l’ingénieur doit la comprendre ainsi que le technicien.
Pour
cela, tous deux doivent la « traduire » dans leur langage
professionnel et savoir ensuite la « traduire » pour le client.
Si
les uns et les autres ne sont pas en capacité d’opérer cette
« traduction », l’innovation risque de prendre du temps pour se
réaliser, d’être refusée ou d’échouer. En effet, il y a des obstacles comme le
cloisonnement entre services qui empêchent l’échange d’informations, les coûts
de traduction (pour comprendre, s’entendre, etc.).
La
réussite de la « traduction », c’est la coopération dans l’innovation
de tous les acteurs concernés. Elle repose sur l’idée que les logiques de
chacun des acteurs appelés à coopérer s’enrichissent mutuellement plutôt
qu’elles ne s’affrontent.
Etude
de cas
Les
coquilles Saint-Jacques (CSJ)
En
1970, les CSJ commencent à se faire rares en baie de Saint-Brieuc.
Les
acteurs concernés sont :
-
les
pêcheurs qui, face à cette fatalité, craignent de devoir changer de pratiques
de pêche,
-
les
chercheurs en laboratoires qui ne savent pas vers quelles solutions s’orienter,
-
les
pouvoirs publics qui souhaitent la sortie de crise,
-
les
clients qui ne veulent pas réduire leur consommation de CSJ.
Les
pouvoirs publics organisent un colloque où chaque acteur dira ses craintes.
En
1986, se met en place un programme d’action en plusieurs phases :
-
phase
de contextualisation : analyse des stratégies des acteurs par des
sociologues
-
phase
de problématisation : mise en place de l’organisation de la recherche
collective
o
non
pas sur les conditions de maintien de la CSJ dans la baie (car c’est un sujet
trop vaste),
o
mais
sur les conditions de reproduction de la CSJ,
o
pour
définir un « bien commun provisoire » de tous ces acteurs,
o
recherche
suivie par un « collectif » où chaque type d’acteur a un
représentant.
- phase
d’observation-recherche : mise en place d’un réseau d’observation en mer
o
les
pêcheurs observent les mouvements des CSJ,
o
les
chercheurs font part en toute transparence de l’avancée de leurs recherches
-
phase
de consolidation : solidification du réseau par
o
la
co-production de connaissances (pêcheurs et chercheurs)
o
l’implication
de nouveaux acteurs : ministères de la recherche, du Commerce extérieur,
la Région…)
o
l’entente
sur les processus de production des CSJ.
En
finale, les pêcheurs, devenus chercheurs pendant un laps de temps, changeront
leurs pratiques de pêche en fonction des découvertes.
La
« traduction » entre les différents types d’acteurs a pu se faire en
prenant du temps (coût de traduction), en travaillant ensemble (décloisonnement).